PlayStation   Moon: Remix RPG Adventure   Aventure   1997  PAR Haganeren 



Lorsqu’on est en France et qu’on est très fan de jeux Japonais, on se retrouve très souvent avec des jeux cultes car mentionnés un peu partout, des screenshots aguicheurs et tout ce qu'il faut pour nous intéresser MAIS... Manque de pot, trop dur d’accès car resté là bas dans la langue originelle…
Et dans ce cas précis, ça touche même un studio entier : Love-De-Lic.


Love-De-Lic ou l'idée qu'on puisse exprimer la chaleur de l'amour à travers des composants électroniques froids.
Oui c'est très hippie...



Un studio qui a toujours été très mystérieux pour nous autre occidentaux et qui a été créé par un certain Kenichi Nishi. Un homme surtout connu pour avoir bossé sur Chrono Trigger et Mario RPG mais qui était déjà dans le milieu depuis un moment puisqu'on le voit dans des compagnies comme Telenet sur des jeux comme Valis.. Exile….Xak… Ushi no Uta… Bon nous on connait pas mais on avait un peu parlé de cette team lors du dossier sur Digital Devil Story.

Bref, déjà à l’époque, Nishi trouvait que ces grosses productions ne lui convenaient pas, il ne pouvait pas vraiment faire ce qu’il y voulait… On ose pas imaginer ce qu’il aurait pensé d’un Final Fantasy XIII…. En tout cas, pour cette raison, il fit sa propre boîte dont le nom “Love de Lic” dérive de l’album “Technodelic” du groupe “Yellow Magic Orchestra” très influent sur le jeu vidéo de l’époque.

Il apporta sur le projet des copains de Square comme :
- Taro Kudo qui serait en réalité le vrai personnage derrière l'idée de créer Love De Lic mais qui est pourtant assez peu connu… Peut être parce qu'il avait une carrière moins palpitante auparavant ayant plutôt bossé avant chez Konami en tant que Sound Designer ( sur Axelay et Castlevania IV ) avant de virer Game Designer sur Mario RPG son seul jeu à Square.
- Akira Ueda artiste ayant bossé sur Secret of Mana et Mario RPG (donc clairement un bon…)
- Kazuyuki Kurashima, character designer sur Mario RPG (oui les persos bizarres c’est lui) et les graphismes de combat de Live A Live.
- Yoshiro Kimura qui sortait de Romancing SaGa 2 et 3… Mais lui en avait juste marre du jeu vidéo et décida de faire le tour du monde... On en parle après.


De gauche à droite, Kudo et Nishi qui discutait d'un "Moon 2" en 2010, Kimura puis Kurashima à Onions Game vers 2017...
En vrai ils avaient au moins 15 ans de moins lorsqu'ils faisaient Moon... Ca passe le temps...



En plus de ces gens là, le studio accueilli pas mal de nouvelles têtes et des anciens de Konami notamment niveau programmation et son ( plutôt technique du son ). Très souvent, les membres de Love-De-Lic décrit le développement de Moon comme une impro de Jazz où chacun fait un peu ce qui lui plait un peu dans son coin… Alors c’est sûr que ça a l’avantage de faire apporter la personnalité de chacun mais le projet avait du mal à trouver une direction claire.

Pendant ce temps Yoshiro Kimura dont j’ai une superbe interview dans le maintenant classique “The Untold History of Japanese Game Developers” avait quitté Square en balançant au patron qu’il ne ferait plus jamais de jeu vidéo de sa vie car il devait s’occuper de sa famille au côté Ouest du Japon… C’était un mensonge, il voulait juste partir dans un grand voyage ! Pour faire plaisir, il avait participé au tout début de la création de Love-De-Lic aux premières discussions concernant le concept de Moon mais malgré ça, il était bien motivé à partir ! Il visita de nombreux pays et se retrouva notamment au Pérou dans un village nommé “Aguas calientes” où il trouva une scène singulière : Un stand avec plusieurs consoles, une Famicom, une Megadrive, une Super famicom et des enfants qui faisaient la queue devant. Chacun avait le droit de jouer seulement 10 minutes ce qui pouvait marcher dans le cas de Mario ou de Zelda… Mais semblait plus compliqué pour un RPG ! Et pourtant, ils jouaient bien à Final Fantasy IV.. Et tout le monde comprenait l'histoire puisqu'ils pouvaient la regarder depuis leur file d’attente comme une sorte de grand jeu en coop ! C’est à ce moment que Kimura décida qu’il souhaitait à nouveau faire des jeux.


Aguas calientes, village très connu pour le site sacré du Machu Pichu…
Ainsi que ses gamins qui font la queue pour jouer à la SNES...


Il mis quelques mois avant de revenir au Japon et n’était pas sûr de revenir à Love-de-Lic spécifiquement. Mais bon, Kudo et Kurashima l'accueillirent chaleureusement et ils allèrent au cinéma regarder Wallace et Gromit : Un mauvais pantalon. Ca, un carton pour faire un bureau avec un PC et hop, il se remit à bosser et il faut dire que pendant tout son temps de voyage, il trouvait que ce projet "Moon" n'avait finalement pas tant avancé que ça ! Ils en étaient encore à se dire qu’ils feraient un presque RPG sans histoire et qu’il faudrait trouver une “porte” dans l’esprit des monstres au lieu de les combattre ? Un truc beaucoup trop compliqué, Kurashima stipula qu’il suffisait juste de faire un jeu de “catch” avec l’âme des monstres et que ça suffirait. Il changea aussi toute l’histoire originelle qui incluait un garçon, une fille et un petit singe… Bon, on a pas plus d’information que ça… Mais déjà à l’époque, il y avait ce petit oiseau nommé “Yoshida-san” qui commentait le monde… D’après lui tous ces changements se firent naturellement, sans qu’il ait besoin de passer pour un tyran. Il essaya en effet de prendre les idées de chacun pour les amener dans un grand tout cohérent… Bref, il prit le rôle de directeur quoi.


Petit schéma du studio Love-de-Lic dans The Untold History of Japanese Game Developers.
Un carton, un PC et hop ! Le développement commence !


Nous n’avons pas forcément trop d’info sur le reste du déroulement du jeu mais on retrouve encore beaucoup d’éléments non utilisés preuve que le jeu changea plusieurs fois de direction. Moon: Remix RPG Aventure, finalement, sorti le 16 octobre 1997 au Japon mais le raz de marée Final Fantasy VII avait déjà fait son office et le jeu fit des ventes “correctes” mais sans plus… Un plan de localisation fut lancé mais promptement abandonné. Le jeu gagna le statut de “culte” au fil des ans mais… Pourquoi ? Après avoir attendu une fan traduction pendant des années, ce n’est qu’alors que le jeu ressort enfin dans un remake sur Switch des années plus tard que je peux enfin me pencher sur la question.




Moon : Remix RPG Adventure
Support : PSX / Switch
Développeur : Love-De-Lic / Onions Game
Date de sortie : 1997 / 2020
Genre : Anti-RPG (?)





Fake Moon ⇔ Real Moon

L’intro de Moon est assez connue, elle montre un petit garçon se poser devant la télé et se mettre à jouer à un jeu… C’est un RPG un peu cheap que l’on se met à contrôler de façon limité (les combats sont automatiques par exemple) On y dirige un héros sans peur parti pour détruire le méchant dragon. On est aimé des PNJs, on va dans les maisons récupérer des armes, on tue des monstres pour level upper jusqu’à un niveau suffisant pour vaincre ce terrible drag-... Ah, non, car votre mère vous appelle pour dormir…


Le jeu démarre par un enfant devant son écran.
Tout cela est bien méta...



Et là, l’impensable se produit : L’enfant arrête ! Alors moi, je peux vous jurer que j’aurais tenté la négociation, fait la sourde oreille, fait semblant d’éteindre la console bref TOUT sauf arrêter le jeu au dernier boss ! Mais il faut croire que cet enfant est très sage et commence à sortir de la pièce… Mais la télé, sans doute aussi surpris que moi par ce comportement, s’allume à nouveau soudainement et absorba l’enfant.

Le petit garçon tombe alors dans un monde différent mais avec des évènements similaires au jeu que l’on nomme souvent “True Moon” par opposition à ce qu'on vient de voir “Fake Moon”. C'est donc à la troisième personne que l'on assite à la scène du héros sortir du chateau après avoir été mandaté par le roi pour tuer le dragon qui aurait avalé la lune.... Globalement assez similaire à Fake Moon donc…. Mais maintenant que l’enfant est un personnage à part du héros, on se rend compte qu’il n’est pas si bon que ça. Les habitants se plaignent de son comportement sans gêne et égoïste et ne le supporte que “parce qu’après tout, il peut peut être ramener la lune”. Tout ce qu’il a fait est désacralisé dans True Moon comme ce rocher qu’il semblait déplacer de sa propre force alors qu’on se rend compte qu’il s’agit en réalité de créatures de roche très timide qui se déplace si on ne bouge pas devant eux pendant suffisamment de temps !  Pire, le héros se met à tuer tout monstre en travers de son chemin sans la moindre retenue ! Il laisse dans son sillage une quantité incroyable de cadavre...


Comparer les scènes de “fake” et “true” Moon est l’un des grands plaisirs du jeu.



C’est là que l’idée du jeu se développe enfin… Moon n’est pas réellement un RPG pour tout dire, de toute façon comme dit plus haut, les développeurs en étaient un peu lassé… Non, Moon serait plus proche du jeu d’aventure qui, s'il était sorti sur PC avec une interface souris, aurait surement été qualifié de point & click ! Le monde est bourré de PNJs tous uniques avec un certain agenda qui se déroule en temps réel. Et pour survivre dans ce monde… Il faudra aimer !


That, too, is love

Oui, aimer, c'est le thème du jeu. Vous trouverez rapidement Gramby, une adorable grand mère aveugle qui vous accueille car elle vous prends pour son petit fils disparu. Elle vous préparera chaque jours des cookies qui peut vous aider à tenir un poil plus longtemps durant la journée.... Parce que oui le début de Moon est un peu raide.... En gros, le joueur a une jauge de “Love” ( absurdement caché dans le menu pour que ce soit clair d’ailleurs ) qui correspond au temps dans lequel il peut marcher dans ce monde avant de… Mourir, tout simplement. Ca rend d'ailleurs le jeu particulièrement pénible au début puisqu'on ne peut survivre qu'à peine une demi journée avant de tomber dans le coma et ce malgré les cookies !


Cette démarche fatiguée arrive peut être un peu tard pour signaler au joueur qu’il va mourir dans les 30 prochaines secondes !



Non, pour sortir de ce début assez délicat, il ne faudra pas hésiter à revenir régulièrement dans la maison de Gramby pour y dormir afin de recharger sa jauge d'amour, sauvegarder et rêver... Rêver notamment de ce drôle de personnage, une sorte de tête de mec à turban qui vous citera toutes tes actions importantes de la journée pour en conclure “oui, c’est de l’amour, tout cela c’est de l’amour !”

“Sauver l’âme de ce monstre, c’est de l’amour”
“Montrer à ce naufragé comment faire du tam tam, c’est encore de l’amour”
“Écouter cette personne se livrer à toi ça aussi c’est de l’amour”


Oui Maman, je joue à un jeu où une tête de bonhomme géante vient me parler de ce qu'est l'amour.
Non Maman, je ne sais pas quand j'ai pris ce tournant dans ma vie.



Tout cet amour permet de monter de niveau et ainsi augmenter cette jauge “d’amour” par tous les moyens possibles…. Amour… Love… Lvl… Level… Niveau... Oui, le jeu repose sur ce jeu de mot, c’est encore un jeu où on augmente ses “lvls” après tout… Et pour ça il y a deux méthodes. La première consiste à attraper les âmes des monstres tués par le héros pour les ressusciter. La seconde consiste à parcourir le monde pour recevoir l’amour de ses habitants.



Faire la chasse à l’amour...

Parce que tout cela, dans le fond, ce n’est qu’un prétexte, une manière de quantifier l’exploration du joueur à travers ce monde étrange. Contrairement à l’intro (“Fake Moon”), chacun des personnages de “True Moon” sont des PNJs uniques avec un emploi du temps plutôt précis…. Même des personnages qui n’auraient aucun rôle intéressants dans un autre J-RPG ! Ainsi, on pourrait zapper ce garde qui ne semble pas spécialement intéressant de prime abord avant de se rendre compte que lui aussi a une vie, qu’il va certains soirs de semaine au bar pour se saouler vu comme sa femme l’a quitté ! Que c’est un homme à qui son fils manque terriblement et que cet étudiant d'un autre pays qui vient d'arriver au chateau, ce garçon jouet, le lui évoque… Bref, un personnage finalement plutôt complexe et ce n’est qu’un exemple parmi tant d’autres.


Un monde vivant, c’est avant tout un monde où les personnages semblent vivre par eux même.
Apprendre leur emploi du temps est un des objectifs du jeu.



Il n’est pas toujours facile de savoir qui va faire quoi et à quelle heure. La plupart des personnages vous donneront des cartes de visites qui serviront à être présenté à d’autres personnages pour recevoir plus d’informations… Et ça c’est quelque chose de très point & click aussi ! Les indices sur les âmes de monstres sont en général plus clair puisque toucher son corps sans vie vous permet d’avoir une description du monstre et donc un potentiel indice sur comment attraper son âme.

Certaines âmes nécessitent juste que vous les attrapiez en allant au bon endroit, d’autres n’apparaissent qu’à certaines heures et d’autres encore attendront qu’un PNJ ou vous même fassiez une certaine action.  Enfin, un nécessite toute un petit puzzle et est même obligatoire pour finir le jeu… C’est très diversifié ! On sent que chaque membre de l'équipe a fait son petit truc qui s'est rajouté à un tout global et ça donne un jeu assez intéressant aux ambiances finalement assez diversifiées.


A gauche, l’animal mort. A droite, l’âme qui se cache dans un coin peu accessible.
Comment l’avoir ? C’est plus ou moins l’idée derrière le jeu...




… dans un monde en impro totale…

Comme dit plus haut, on retrouve trace de beaucoup de contenu non utilisé, conséquence direct du processus de développement. Un cirque, notamment, vu dans des backgrounds que l’on peut voir durant les rêves semble avoir été envisagé… Une fin alternative, beaucoup plus poussé que la fin retenue finalement est encore dans les fichiers du jeu et les développeurs ont même réfléchis jusqu’au dernier moment pour rendre cela accessible durant ce remake avant de se dire que faire quelque chose de fidèle était mieux… Ils n’ont pas tort, c’est une fin intéressante mais qui ne semble plus trop convenir avec la direction finale du jeu… On en reparlera.

Bien sûr, la technique de l’improvisation de design constante n'est pas sans défaut. On se retrouvera avec quelques passages assez délicat à comprendre même si la nature ouverte du jeu atténue heureusement la chose. Les moments les plus lourdingues pouvant être zappé pour atteindre la fin plus tôt... Enfin... Sauf le fait qu'il y a des objets à récupérer à un moment pour finir la quête principale et qu'il y en a deux dans à pêcher au même endroit ce qui est parfaitement contre-intuitif ! Mais à part ça, ça va encore… C'est pas trop dur.


Cette image de concert représente bien le concept “d’impro” je pense.



Par contre si vous voulez le 100%... Et bien là c'est plus compliqué. Bon, déjà, heureusement, le jeu possède un système d'indice représenté par la personne d'Adder, un espèce de gourou dansant à moitié fou qui vous dira où trouver des quêtes donnant de l'amour. Ce personnage est d'ailleurs inspiré de Masanori Adachi, le compositeur de Moon qui n'arrêtait pas de chanter et danser durant le développement ! Ce système permet au moins d'éviter beaucoup d'écueil même si il reste encore le cas de la pêche... Un mini-jeu globalement basé sur la chance puisqu'on ne sait pas ce qu'on va pêcher dans une zone, on ne sait pas si on connait toutes les choses à pêcher dans cette zone, et on ne sait pas combien de temps va passer avant que la ligne bouge.... C'est particulièrement ennuyeux lors de ce fichu concours de pêche qui demande à pêcher 6 poissons ( et pas "plus de 6" contrairement à ce que dit la trad, dieu merci ) dans un temps limité... Un truc infâme qui m'a pris plus de 15 essais sachant que je me considère chanceux, la soluce parle de 35 de son côté !


… Face à la beauté du quotidien…

Oui, bien sûr qu’il y a des petits endroits où ça coince, c’est le lot commun de la diversité mais dans l’ensemble, la découverte du petit monde de Moon est un plaisir constant. Chaque PNJs est une aventure, chaque lieu une atmosphère et ce grâce à l’écriture toujours charmante de l’ensemble mais aussi de sa direction artistique.


Ces petits dialogues rigolos, c’est ça qui nous rend le voyage mémorable.
"Si il s'avérait que ton partenaire était quelqu'un de bizarre, tu ferais quoi ?
- Fuir
> Devenir bizarre aussi.



En pleine production, Kudo proposa soudainement de faire les monstres du jeu en pâte à modeler, là, comme ça, d’un coup pour tout changer… D’ailleurs certains assets vieux peuvent encore être repéré avec l’ancienne direction artistique. Du coup c’est pas seulement Kurashima, le designer attitré qui s’y est mis mais carrément toute l’équipe même les managers qui se sont embarqué dans un petit atelier pâte à modeler ! Et le résultat ? Une cinquantaine de créature bizarres à sauver dans le monde ! D’autant que les sauver permet à un petit alien de passer pour l’emporter histoire de le protéger tout en octroyant au joueur un peu d’argent dont il aura besoin au cours de l’aventure.

C’est ce mélange de pâte à modeler, de rendu 3D typique de ces années là et de pixel art qui donne à Moon ce côté aussi improbable et qui témoigne encore de l’improvisation totale dans lequel il a été imaginé. Certes, tout ne parait pas toujours cohérent mais cela donne à l’ensemble une créativité incroyable comme une sorte de grand rêve éveillé dont on ne voudrait pas se réveiller.. Et quand on y réfléchit, c'est un peu la base du scénario.


Chaque lieu semble accueillant et remplis de personnalité.



Avec cela, le chara design est très marquant avec des personnages aux caractéristiques très marqué comme la vielle femme avec ses cheveux en turban qui fume la pipe, le boulanger et sa tête bizarre, le roi Carefree (“sans soucis”) et sa barbe immense  ou même ce petit oiseau Yoshida qui semble en savoir beaucoup sur le monde… Ce n’est pas qu’en terme d’écriture qu’ils sont agréables mais tout le chara design est absolument charmant.

Quand à la musique, alors là, on est dans une idée un peu curieuse qui fait que le jeu est globalement dans le silence sauf dans certains lieux précis mais le joueur a l’occasion de s’acheter les musiques qu’il souhaite dans un magasin avec chaque titre possédant une petite review de l’un des PNJs. Une idée donc extrêmement curieuse qui permet de passer la musique qu’on veut quand on le veut d’autant qu’ils ont pas été rapia niveau OST : Rien que dans les CDs à choisir, il y en a plus de 30 et c’est sans compter les musiques dans le jeu lui même ! Et là, y’a de tout et parfois du bon expérimental !


… Ouvrirez vous la porte ?

On arrive à la partie où je parle de la fin.. Et là ça m’ennuie parce que en vrai… Je veux pas vous la dire… Parce qu’elle est très bien… Du coup beeen spoiler…

Spoiler:
Très clairement, la fin est à l’image de Kimura, le designer qui se dit lui même “globe trotter”. Après avoir visité le monde, une île déserte, une cité technologique on finit par rapporter les éléments nécessaires à la construction de la fusée. Dans “fake moon”, l’intro, il était dit que le dragon avait dévoré la lune ce pourquoi le héros était appelé. C’est beaucoup moins clair dans “True Moon”, du coup, on décide de faire la chose qui va de soi : Tenter d'aller sur l'astre pour vérifier soi même.


Oui ! Sur la lune !



Le voyage se fait presque sans accroc et on retrouve sur le satellite tous les animaux que l’on a réussi à sauver. Cela donne un véritable sentiment de complétion amplifié par le fait d’enfin trouver le personnage qui vous parle dans les rêves. Depuis le début, toutes les réponses étaient sur la lune ! Mais ce personnage demande quelque chose d’étrange. Il demande “d’ouvrir la porte”, alors on va près de la porte et… elle ne s’ouvre pas, malgré le fait d’avoir aimé…

Alors, le héros destructeur qui a réussi à embarquer en douce dans la fusée se lève et commence à massacrer toutes les créatures pour gagner toujours plus de niveaux supplémentaires. Il en tua tellement qu’il atteint le niveau maximum et vous ne pouvez rien faire pour l’arrêter… Finalement, il réussit à détruire le personnage qui vous parle en rêve et qui faisait office de dragon avant de tuer le joueur lui même et se donner la mort.


La terrible fin de Moon
Tous ces animaux sauvées pour qu’ils se fassent massacrer, transformés en… Puce électronique ?



Une fin tragique et pourtant amplis de logique : Après tout, qui pourrait se dresser face au héro d’un J-RPG?.. Il est forcément le plus fort ! C’est une fin qu’il est intéressant de comparer avec celle qui a été cutté dans lequel on voit un lore plus développé avec un dragon soigneur de monstres qui se fait tuer par le héros avant que l’on apprenne que ce héros, justement, était le petit fils disparu de Gramby et qu’il était terrifié dans cette armure. Alors, pour s'excuser de son crime et en cherchant à expier ses fautes il devint lui même le dragon avant que le monde ne reboucle sur lui même et qu'un héros, lui même, le tue à son tour…. Un lore intéressant mais qui sans doute rendait le message moins clair…

Ben oui car le message.. C’est de sortir… Lorsque le petit garçon reprend ses esprits, un choix est donné au joueur et…”Continue ?” apparaît avec un classique “Yes” et “No”. Moi, habitué, je fais “oui”, le garçon rentre à nouveau dans la télé et… Le jeu s’arrête… L’écran est noir… On ne sait pas ce qu’il s’y passe…. A l’inverse, dire "non", c'est abandonner le jeu vidéo. C'est abandonner ce monde qui paraissait si vivant et qui pourtant est aussi faux que “Fake Moon” comme le prouve le fait que les monstres ne soient que des puces électroniques depuis le début. Bref “ouvrir la porte” de chez soi, c’est avoir une chance de rencontrer des gens, de voir le monde et de vivre “en vrai” ce que l’on a vécu dans le jeu.


Les crédits sont l’occasion de voir les créatures du jeu dans la vraie vie.
Certains dira que c’est ainsi, libéré de la contrainte du jeu qu’ils sont enfin libre.
Moi je pense que l’idée était de dire que les plus belles rencontres se font forcément hors du jeu



Un message un “brin” paternaliste que les fans du jeu s’empresse d’adoucir en disant que “en fait ça représente la porte de notre cœur qu’on doit ouvrir vers l’extérieur” ou quelque chose du genre mais à priori d’après les interviews c’est plutôt premier degré et comme je disais au début ça sied finalement plutôt bien à Kimura, ce designer qui encore une fois, aime se dire globe-trotter.

En tout cas, c’est une fin avec beaucoup d’impact qui m’aura bien marqué.



Love-de-Lic, le studio qui brillait dans sa mort.

Moon sorti en 1997 au Japon et si il a atteint un statut culte aujourd’hui, sur le moment, il fut quand même pas mal occulté par un certain Final Fantasy VII contre lequel il était plus que difficile de lutter. Il se passa alors quelque chose d’intéressant à toute l’équipe de Moon : Elle se sépara en deux avec d’un côté UFO : A day in the Life sur Playstation en 1999 et de l’autre L.O.L : Lack of Love sur Dreamcast en 2000.

Il faut bien comprendre que c’était un studio de passionné… Mais surtout de fortes têtes et le fait que Moon ait reçu les directions de tout ce monde sans que personne se tape dessus est un miracle en soi qui ne pouvait pas durer sur la longueur… Mais étrangement cela rendit la réputation de Love-De-Lic encore plus légendaire car tous ces gens partit dans des directions opposés pour créer tout un tas de jeux pas comme les autres un peu partout.

L’équipe UFO : A day in the Life dirigé par Taro Kudo fonda donc le studio Vampool dès 1999 alors qu’il était l’homme qui avait voulu de ce studio Love De lic à la base… Dans une interview UlTRA paumé d'époque il mentionne qu’il y a “deux love de lic” et qu'en tant que personange "pur", il n’aime pas ça ce qui le conduisit à créer ce nouveau studio avec notamment Kazuyuki Kurashima, le chara designer. C’est d’ailleurs sans doute grâce à lui que Mario & Luigi : Superstar Saga a un petit caméo de Geno de Mario RPG… En effet Vanpool a aidé aux mini jeux de ce dernier.

Pour le reste, ils commencèrent avec le très “Love De Lic-like” Endonesia avant d’avoir été remarqué par Nintendo puisqu’ils firent par la suite le très étrange “Freshly-Picked Tingle's Rosy Rupeeland” mettant en scène le personnage de Tingle de la série Zelda. Puis Little King’s Story sur Wii, La série des Dillon’s Rolling Western sur 3DS, un autre RPG de Tingle avec un nom pas possible… Bref, plein de trucs qui nous sont parvenus.



Les projets Vanpool
Globalement les jeux qui part le plus dans tous les sens, faudrait que je fasse les Dillon un jour !



L’équipe “L.O.L : Lack of Love” avait comme personnage proéminent le CEO lui même donc Kenichi Nishi qui avait déjà fait des infidélité à sa boite en 1999 pour designer le très très barré Incredible Crisis sur Playstation. Du coup, en 2000, il fonda la compagnie Skip.Ltd pour ramener sa partie de Love de Lic sur de nouveaux projets. Dont les très “Love De Lic-like” Giftpia, Chibi-Robo sur Gamecube et Captain Rainbow sur Wii qui mériteraient certainement chacune une review détaillée tant ce sont des jeux originaux.

Ils se sont aussi spécialisé dans la création de petits jeux au concept très simple et original qui serait un peu l’équivalent à des jeux flashs assez expérimentaux d’occident. C’est Nintendo qui finance (comme souvent) tout ça pour sortir sous le nom de “bit Generation” sur GBA ou  “Art Style” sur WiiWare


Les projets Skip.ltd
Globalement, ils ont l’air bien chez Nintendo, même si leur star Chibi Robo n’a pas réussi à revenir après Zip Lash sur 3DS.



Enfin, qu’est-il arrivé à Yoshiro Kimura dont l’interview permit d’avoir une bonne idée de son parcours ? Il travailla légèrement sur L.O.L : Lack of Love mais “son tempérament” l’obligea à partir à nouveau, cette fois en Alasaka et à d’autres endroits qu’il ne mentionne pas avant de revenir au Japon avec une impression bizarre.. En effet, il avait une maladie très grave, son coeur s’élargissait et devenait trop fragile ! Un truc comme ça… On parle mieux de jeu vidéo que de médecine sur ce site.. Toujours est-il qu’il était gravement malade et que son futur studio “Punchline” n’était à la base rien d’autre qu’un… Groupe de discussion autour du jeu vidéo. Ses amis venaient alors pour discuter et brainstormer des idées une fois par semaine “juste comme ça” et vu qu’ils s’entendaient bien, l’idée de fonder un studio germa.

Il demanda de l’aide à Hiroshi Suzuki, un type qu’on a jamais mentionné mais qui était le producteur de Moon… Et est aussi cité en tant que Producteur d’Endonesia par Vanpool, de Giftpia par Skip et maintenant par le premier projet de “Punchline”.. Le mec il est partout ! En tout cas l’éditeur Victor fut intéressé notamment parce que son directeur Yasuhiro Wada était un grand fan de Moon ce qui permit de débloquer les fonds pour le très “Love de Lic-like” Chulip sur PS2. L’air de rien, Kimura le considère carrément comme une sorte de Moon 2 où il parle de l’amour qu’il reçut durant sa maladie où il ne pouvait avancer que quelque mètres chaque jour en découvrant ses propres voisins…

Enfin, il passa à complètement autre chose avec l’horrifique Rule of Rose sur PS2 très connu pour sa polémique absurde en Europe ! Il travaillera plus tard pour Grasshopper en tant que producteur de titre comme No More Heroes sur Wii, Shadow of the Damned sur PS3 et comme directeur de Little King’s Story également sur Wii ce qui lui donna l'occasion de se remettre avec les copains de Vampool qui le développait. C'est d'ailleurs un autre titre qui lui est assez personnel.


Un peu moins de projet chez Punchline mais l’air de rien, Chulips a ses fans et Rule of Rose a marqué… Différemment le monde du jeu vidéo.
Je rajoute Little King Story pour faire bonne mesure.



C’est là qu’on en arrive à pourquoi Moon est un jeu aussi marquant… Pas tant pour le jeu en lui même qui est une expérience très sympas en soi mais surtout pour son aura, pour ce qu’il a inspiré. La dislocation de Love-de-Lic pourrait être vu comme sa fin au premier abord alors qu’il s’agissait en réalité du vrai moment où sa légende commence.

Moon, c’est pas un RPG contrairement à ce que disait ses auteurs, c’est un genre de jeu assez particulier que les membres de Love-de-lic n’auront de cesse de recréer. Ces caractéristiques sont les suivantes :
- Il doit avoir un ancien de Love-de-Lic (ou être produit par Love De Lic )
- Il consiste souvent à explorer un monde peuplé de PNJ originaux.
- Sa direction artistique est assez délirante / non réaliste.
- On doit souvent y trouver de l'amour, du bonheur, des choses postiives.
- Il a des thématiques inhabituelles, un peu hippies, avec une glorification des petites choses du quotidien, souvent une critique sociale, du sarcasme, de la parodie voir de l'humour noir dans les conversations.
- Les voix sont parlés dans un langage inventés (ça parle "yaourt" quoi, Kenishi Nishi appelle ça le "Hanamogera" )
- Il n'y a pas de combats... Ou alors ce n'est pas l'axe principal du jeu.
- Le monde évolue en temps réel et cela influe les actions des personnages du monde

Ouais à part les trois premiers points, on dirait que les Sims rentre dedans !
En vrai tous les jeux dit "Love-de-lic-like" n'auront pas forcément tout ces trucs dedans (à commencer par LOL : Lack of Love et UFO : A Day in the Life ) mais on retrouve quand même souvent ces caractéristiques dans Giftpia, Endonesia, Chulip, Chibi-Robo, Little King Story voir les Tingle RPG... Bref, tout ce qu'on a déjà cité... Et c'est ça qui est fou, se rendre compte que tout ces jeux bizarres avaient en réalité un point commun. Comme si Love-De-Lic avait parsemé sa philosophie de design un peu partout à sa mort... Enfin sa mort... Les membres sont encore en vie en 2020 ! C’est bien grâce à ça qu’on a pu enfin jouer à ce jeu !

Histoire d’un remake

Ce remake, ça n’a pas été une évidence pour ses membres éclatés aux quatres coins de l’industrie Japonaise… D’ailleurs ils avaient perdus le code source du jeu originel ce qui limitait grandement les possibilités !


Bien dit Professeur Hibou !



L’histoire commence en 2012 où Kimura se rendit compte de l’ampleur du phénomène “indie” en Occident en assistant à l’IGF : Independent Games Festival. Il en aurait eu les larmes aux yeux devant tant de créativité et de volonté de repousser les limites du medium avec des équipes plus réduites. Cela le poussa à faire sa seconde compagnie “Onion Games” qui se voulait à la base comme une sorte de “mini éditeur pour développeur passionné qui aiment être payé en exposition” de ce que je lis entre les lignes… Je ne suis pas sûr qu’on ait vraiment vu la couleur de tous ces petits projets…Dans les faits, il s’occupait de cette petite entreprise avec Tomo Ikeda qui était une grande figure de Rule of Rose et ce bon vieux Kazuyuki Kurashima au chara design. Souvenez vous ! Il était déjà sur celui de Mario RPG et avait été embarqué dans Moon. Après cette aventure il partit pour Vampool mais avait déjà retravaillé avec Kimura sur Little King’s Story

C’est en 2017 que sortit les premiers jeux d’Onion Games : “Dandy Dungeon” sorti sur mobile suivit de près par “Million Onion Hotel” sans compter le très sympathique “Black Bird” un an plus tard sur PC. Et c’est dans une interview du Famitsu traduite par vgperson que l’on apprend que jusque là, Kimura était un peu blasé de se faire entendre dire que Moon était son seul vrai chef d’oeuvre, que ses jeux d’avant étaient plus intéressants…. Alors, il décida d’y rejouer pour se rendre compte que.. Beeeen c’était quand même pas si mal… Et par un tour du destin assez fou, un vieux collègue de Love-De-Lic retrouva le code source d’une version “quasi finale” de Moon alors que tout le monde pensait que c’était perdu !


Les projets Onions Game.
Plus récent et donc d’abord orienté sur le marché mobile, Black Bird fait une transition vers la console sans compter bien sûr, le remake de Moon.


Avec cela, Kimura reçu plein de pressions venant de diverses personnes… Famitsu organisa pour les 20 ans de Moon une petite table ronde qui conclut “ce serait bien d’y jouer à nouveau…” par exemple. Il cite également Toby Fox comme l’une de ses plus grosses motivations. Car oui, son célèbre Undertale a été, en plus de la série Mother, assez inspiré par Moon… Sans qu’il ait pu y jouer pour autant vu que c'était en Japonais ! M’enfin on voit que cette idée de “sauver les monstres au lieu de les tuer” est similaire.. Du coup quand Toby rencontra Kimura au Japon, il lui demanda aussi “pourquoi ne pas avoir release Moon dans le monde entier ?” et Kimura, qui avait pourtant abandonné, se dit que finalement il avait tous les éléments pour rendre cela possible.

Ils choisirent la Switch principalement car Black Bird et Dandy Dungeon avaient déjà été porté dessus et qu'ils connaissaient donc cette console mieux que les autres. Mais Moon est un jeu Playstation et le hardware fonctionnait très différemment à l'époque. Ils essayèrent de faire fonctionner le code original de la Playstation ce qui fut très difficile... Pire, certaines données graphiques semblaient avoir été détérioré, comme si ce backup avait mal fonctionné à la base ! Ils n’avaient pas le choix : il fallait récupérer des choses du jeu originel lui même et donc appeler l'aide d'un mystérieux développeur Playstation surnommé « Sempai » par respect.


Ici, Nishi qui tient un disque de Moon…
Si il avait pu savoir que tout le monde allait courir après son code source 20 ans après…


Tout le processus fut décrit comme très émotionnel pour Kimura qui se plongeait dans son moi d'antan avec ses faiblesses mais aussi sa force. Il eut souvent envie de modifier un peu le jeu notamment le début un peu rough ou rajouter des éléments retirés mais se dit que ce que veulent les fans, c’est pouvoir rejouer au même jeu qu’à l’époque. Du coup, la seule réelle différence outre quelques bugs corrigés (et encore, juste ceux qui sont vraiment gênant pour le déroulement du jeu), ce sont les musiques en stéréo !

Bien sûr, tout cela n’aurait eu peu d’importance pour nous si ce remake était resté au Japon mais non ! le remake fut annoncé avec une traduction anglaise, ce qui me rendit tout fou ! Non oui française faut oublier par contre, d’autant que pour cette localisation, un journaliste de jeu vidéo assez connu Tim Rogers fut choisi... Moi je le connaissais pas mais il est reconnu pour sa verbosité et sa manière d'écrire des articles en mettant un très gros accent sur sa propre expérience plutôt que de juste décrire le jeu en se voulant objectif... Pourquoi le choisir lui ? Kimura l’a rencontré durant le Tokyo Game Show et lui reconnaît une profonde compréhension de la culture Japonaise ce pourquoi il travailla sur la traduction de Dandy Dungeon. Cela s'était bien passé alors le choix fut tout trouvé pour Moon. Je n’ai jamais lu l’un de ses articles mais pour ce jeu, en tout cas, ce fut un fantastique choix qui donna une vraie âme à la localisation, des choses dont on a malheureusement besoin en Occident pour apprécier tout le charme de l'oeuvre originale.

Ainsi, nous pouvons jouer à Moon.

Retrouver une partie manquante d'un puzzle qui me taraudait depuis longtemps
Alors, c’est pas une belle histoire ?


Adieu Moon…
Mais si je veux te revoir, tu as encore bien des descendants auquel je n’ai pas joué.
Hélas, il m’est difficile d’ouvrir la porte.


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