« Something stirs inside you... a presence, a hunger. It is bound, angry and it cannot escape... »
Neverwinter Nights 2 : Mask of the Betrayer, sorti fin 2007 sur PC, est une extension du RPG Occidental Neverwinter Nights 2, tous deux développés par Obsidian Entertainment (connus aujourd'hui pour Fallout : New Vegas et leur dernier projet en cours, Project Eternity). Les deux jeux (ainsi que les deux autres extensions, à savoir Storm of Zehir et Mysteries of Westgate, qui seront absents de cette review) sont basés sur l'un des univers communément utilisés pour le très célèbre JdR Donjon & Dragons, à savoir les Royaumes Oubliés, également le théâtre d'autres jeux, à savoir la série des Baldur's Gate et des Icewind Dale.
En tant que paragraphe introductif, il est bon d'apporter quelques précisions. Malgré qu'il soit l'extension d'un jeu déjà existant, la campagne de Mask of the Betrayer est entièrement séparé (à l'exception de quelques références sur lesquelles nous reviendrons plus tard) du jeu original, qui sera plus traité comme élément comparatif que comme son propre jeu. Vu qu'il est possible que vous soyez intéressés par la campagne originale après ceci, nous n'en ferons qu'un vague synopsis.
Car oui, vous, oui vous là au fond, êtes un héros, après tout. Lié(e) à une grande destinée de sauvetage du monde contre un mal ancien, vous avez vaincu au nom du Bien... ou au nom du Mal. Après avoir supposément vaincu votre archnemesis, son sanctuaire infernal s'écroule, vous englobant vous et vos compagnons...
… puis vous vous réveillez dans une caverne. Vous n'avez aucune idée de où vous êtes, le memento de votre destinée a disparu et à la place se trouve une horrible faim qui vous ronge le corps et l'esprit et une armée d'esprits antiques qui veulent votre peau. Alors, partants pour une nouvelle aventure ?
Pas de souci mais pourquoi est-ce que je suis un rocher moi?
The Red Woman lowers her eyes and gazes into yours. « For Love. » You mouth the words she speaks aloud.
Mask of the Betrayer ne renonce pas à ses racines et utilise toujours le système de l'édition 3.5 de Donjons et Dragons. S'il est naturellement possible à ceux qui ont fait le jeu original de simplement utiliser leur personnage, les nouveaux venus pourront directement commencer en créant un nouveau parmi les diverses races et classes et en choisissant vous-même comment monter en grade vos statistiques. Les initiés au WRPG ou tout simplement les curieux pourront ainsi expérimenter et voir un système de compétences assez développé qui peut aller de la détection de piège aux écoles de magie, tout en passant par les obligatoires compétences de dialogue. Le jeu offre de nombreuses possibilités de construire un personnage de la manière que l'on souhaite. Les novices, eux, ne seront pas délaissés vu qu'ils pourront tout simplement laisser le jeu choisir les statistiques selon la classe qu'ils ont choisie et se fier à son jugement durant la totalité de la partie. La vie n'est-elle pas magnifique ?
… Mais cela ne veut pas dire pour autant que vous pourrez vous reposer sur vos lauriers. Car, autant vous prévenir de suite, MOTB est un jeu impitoyable envers les non-préparés. Foncer tête baissée dans le feu de l'action ne vous amènera pas à grand chose et cela même en Facile. Le système de combat, pouvant passer de temps réel à tour tour selon votre volonté, demandera un certain temps d'adaptation et la volonté du joueur à lire les très nombreux renseignements que le jeu lui offre sur son système.
Combattre des arbres et des trolls géants à deux tête avec en alliés un ours arc-en-ciel, un ange et un type bleu en tenue de léopard font partie des aléas de la vie.
De ce point de vue, le jeu fait un excellent travail. Chaque sortilège, capacité, statistique possède une explication en détail de ses effets, positifs et négatifs. L'interface est très claire et même personnalisable à un certain degré. De manière générale, le jeu est très ouvert aux nouveaux venus et leur laisse tous les outils nécessaires pour qu'ils puissent en saisir toutes les subtilités.
Généralement, MOTB est est une amélioration directe du jeu sur lequel il est basé, corrigeant la plupart de ses problèmes et ajoutant de nouvelles possibilités et mécaniques. On aurait pu croire à un premier abord qu'il ne s'agissait que d'une évolution mécanique de NWN2, gardant les bases pour ensuite travailler dessus.
Puis il décide de couper les liens.
Un jeu hilarant pour toute la famille.
Basé sur un univers où se déroulent de nombreux jeux plus centrés sur de la Fantaisie classique, Mask of the Betrayer s'éloigne des monstres mythiques, héros légendaires et châteaux pour explorer un monde plus exotique, habité par les esprits ancestraux, sorcières, shamans et rêves. Cela donne un résultat très correct, chaque zone possédant une identité très distincte et marquée et offrant un tout immersif.
Cela est en autre grandement aidé par l'OST, expérimentation étrange qui jongle souvent entres différents styles mais parvient à un excellent résultat : chaque musique va comme un gant à sa zone associée, rendant le plus petit et insignifiant des lieux plaisant à explorer voir passionnant à regarder. Aucun morceau ne sonne faux ou ne lasse, apportant un plus indispensable au plaisir de jeu.
Ce changement de perspective se montre aussi dans la structure même de l'histoire. De la quête héroïque du jeu original mettant en jeu le destin du monde entier, on passe à une quête beaucoup plus personnelle et linéaire, à l'atmosphère infiniment plus sombre et ambiguë. De dix compagnons qui se mettent à votre service, on passe à 4 personnages cherchant avec vous le moyen de vous sauver de la malédiction dont vous êtes affublés. Chaque membre de cette équipe beaucoup plus réduite possèdent des personnalités beaucoup moins extrêmes que ceux de la campagne original et en échange, sont largement plus développés, avec leurs qualités, défauts, craintes et espoirs pour l'avenir. Leurs soutiens se révéleront précieux dans votre quête, tant d'un point de vue histoire que gameplay, et votre comportement auprès d'eux pourra largement influer leurs destins.
Merci pour tes conseils avisés.
Ce qui nous amène au point central et ce qui fait la force de Mask of the Betrayer, à savoir son scénario. La musique d'écran titre ne cache rien à la nature sombre et pesante de votre lutte contre la destruction de votre âme et la recherche d'un remède à votre condition, démêlants les mystères et découvrant les acteurs de ce drame. A partir de là, on assiste à du génie pur : le scénario de MOTB est indubitablement un chef d'oeuvre. Le jeu est plutôt court (aux environs de 15h si vous souhaitez finir l'entièreté de la quête principale) mais arrive à développer sa structure, ses personnages et ses thèmes à la quasi-perfection. Pas un seul passage n'est en trop et chaque scène construit et complète la thématique globale
Il est difficile d'en parler en détail sans spoiler mais un travail immense a été apporté à chaque dialogue et scène, écrites de manière magistrales. Le doublage, de même, n'a absolument pas à rougir et donne aux personnages une très intéressante dynamique, par eux-même et par leur interaction entre eux. Votre avis vous sera également demandé dans de nombreux cas afin que vous sortiez d'une situation tendue sans avoir besoin d'invoquer des pluies de météore ou vous permettre de définir votre comportement, allant du défenseur de la veuve et de l'orphelin à l'enflure psychopathique dévorant des âmes d'enfant au petit déjeuner.
Vos statistiques peuvent ouvrir de nouvelles options de dialogue qui peuvent offrir de nouveaux détails voir d'autres manières de terminer une discussion. Et puis, franchement, qui n'a pas envie de menacer une pauvre fille en lui faisant croire qu'on est un monstre infernal, hein ?
Les personnages, de même, sont extrêmement bien développés, tombant rarement dans l'extrême caricature. Leurs idéaux sont rigoureusement encadrés et s'insèrent dans la dynamique de l'histoire sans problème. De manière plus générale, la narration elle-même s'éloigne du manichéisme pour apporter des points de vue ambivalents mais pas forcément incorrects, laissant votre jugement prendre libre cours... ou bien tout simplement rejeter tout ce cirque et être la plus immense enflure depuis la création de l'humanité et ne laisser que des cendres sur votre chemin, auquel cas attendez-vous à un spectacle d'une cruauté rarement égalée.
Cette ambiguïté ne rend l'histoire que plus passionnante et circuler à travers elle devient un pur plaisir, chaque zone démêlant une partie de l'intrigue jusqu'à l'éventuel climax qui répond à chaque question et emballe le tout de manière quasi-parfaite.
Et vous pouvez tuer des arbres ! DES ARBRES!
Mais, car il y a toujours un mais, le jeu n'est pas sans défauts, outre le temps d'adaptation dont nous avons déjà parlé. Les habitués des jeux Obsidian seraient surpris de voir que le jeu est d'habitude très stable et n'effacera pas votre sauvegarde dès que vous entrez dans un bâtiment. Néanmoins, vous pouvez vous attendre à des gros problèmes d'optimisation même avec un bon PC, surtout quand chaque personne présente dans la salle lancent leurs plus puissants sortilèges en même temps. On peut s'attendre à quelques gênes, comme un membre de l'équipe qui décide arbitrairement de ne plus vous suivre (et que vous remarquez à l'autre bout de la carte alors que vous entrez en combat contre une flopée de monstres géants) ou bien de changer de position lors d'un dialogue (conduisant à voir deux personnes se parler dos à dos avec une qui bloque la caméra), plus étrangement, une sorte de 'lag' où votre personnage se retrouvera soudainement 3 mètres en arrière ou bien un ennemi se téléportant devant votre figure. Il est bon aussi de noter la caméra très hasardeuse : malgré trois modes différents, elle peut se retrouver dans des angles impossibles vous cachant tout ce qui se passe ou bien carrément se reconfigurer de elle-même, vous forçant à faire un passage par le menu options. Enfin, les modes de difficulté ont été paresseusement réglés, ne faisant qu'augmenter les dégâts des ennemis et réduisant les vôtres. Rien qui puisse empêcher d'apprécier le jeu, mais qui peut emmerder pas mal de monde selon les préférences.
Arrive aussi un des points les plus discutés au niveau des mécaniques : votre barre d'énergie spirituelle. Votre malédiction se manifeste en jeu par une barre allant de 100 à 0, et baisse à travers le temps, vous rendant de plus en plus faible avant de vous tuer. Pour remédier à ce problème, vous devez manger des esprits (même si vous pouvez obtenir d'autres méthodes selon ce que vous faites dans le jeu). Certains considèrent ça comme un bon moyen de lier scénario et jeu mais d'autres pourront être énervés par cette ressource à gérer, en particulier pour les mages qui ont besoin de se reposer pour pouvoir relancer des sorts ou les personnages mauvais qui verront leur barre baisser à la vitesse du son s'ils abusent trop de leur capacité à dévorer les âmes. On trouve toujours des moyens de s'y habituer, mais il est vrai que les développeurs auraient pu trouver des méthodes moins fastidieuses pour faire de la malédiction un élément du gameplay.
On peut aussi noter quelques points sur les liens avec la campagne originale. Malgré que les deux scénarios soient complètement séparés, il existe de petites références, notamment à vos anciens compagnons et à ce que vous avez auparavant fait. Faire MOTB sans passer par NWN2 est possible, mais vous pourrez passer à côté de quelques détails qui peuvent faire toujours plaisir si vous avez fait les deux. A vous décider.
Ca et par moment les couleurs des décors disparaissent sans aucune rai- ha bah non, c'est normal en fait.
Mais malgré ces points, qui restent mineurs, le point central reste : MOTB est l'un des meilleurs RPG jamais fait. Admirablement bien construit, son gameplay on ne peut plus correct, son OST sublime, son atmosphère étrange et passionnante, ses personnages attachants et intéressants, son scénario magistral se combinent en un véritable tour de force impossible à rater. Que vous fassiez NWN2 ou non, que vous l'achetiez ou non, cela n'a au fond pas d'importance : le jeu est un indispensable à faire qui restera souvent cité, et à raison, parmi les grands noms du RPG en Occident.
Un mot pour la fin, Gann ?
Merci, Gann.